Pleine Lune en Sagittaire
Sous la gouvernance de Jupiter désormais installé en Cancer
Voici une Lune qui cherche l’expansion, l’envol, le dépassement. Une Lune pèlerine, avide d’horizons larges, de vérités à embrasser, de terres à fouler… Mais depuis que Jupiter a quitté les plaines mentales des Gémeaux pour plonger dans les eaux matricielles du Cancer (depuis le 9 juin), un retournement subtil s’opère.
Comme si le regard du Sagittaire, habituellement tendu vers le lointain, se laissait doucement aimanter par notre paysage intérieur. S’élancer, oui, sans oublier l’aventure souterraine. Ouvrir les espaces secrets qui nous habitent et réveiller nos mémoires les plus enfouies. Ce que nous cherchons dehors pourrait bien être la résonance d’une quête plus ancienne, plus intime : celle de nos appartenances, de nos racines, de notre temple intérieur.
Et si l’expansion véritable commençait par l’accueil de nos blessures ?
Et si notre croissance se mesurait à notre capacité à ne pas fuir ce qui émerge des eaux porteuses des mémoires qui nous fondent, nous attachent et nous noient quand nous n’y prenons pas garde ?
Le carré de cette Pleine Lune aux nœuds lunaires renforce cette sensation d’un carrefour de destinée : ce que nous ne transformons pas en conscience, nous risquons de le répéter.
Peut-être faut-il, pour avancer, déposer les oripeaux d’une affectivité restée adolescente — les aspects du moment peuvent révéler l’enfant blessé en quête de sécurité.
Mais la vie ne nous demande-t-elle pas ici de devenir notre propre berceau ? Notre place, notre maison intérieure n'est-elle pas à construire sur des fondations de solides? Ou se trouve notre foyer, à l'extérieur ou à l'intérieur? Ou pouvons-nous construire notre sécurité? Ne sont-elles pas à construire au milieu de toutes les expériences, de tous les lieux géographiques?
Mercure aussi navigue dans les eaux du Cancer : la pensée se trouble, devient sentiment. Il devient difficile de penser sans ressentir, d’analyser sans s’émouvoir.
Une parole douce, mais vulnérable, cherche à émerger.
Vénus, elle, en tension avec Pluton, expose les failles du cœur :
Attentes déçues, peurs de la trahison, du rejet…
Elle rêve d’un amour qui répare, mais se heurte peut-être à l’épreuve du réel, ou à l’ombre des dépendances affectives.
Mars en Lion voudrait rayonner, se montrer dans toute sa splendeur, mais le carré à Uranus bouscule cette assurance.
Quelque chose veut jaillir, s’affirmer, s’incarner — mais la Terre tremble sous nos pas.
Une joie se cherche, mais vacille sur des fondations instables.
Alors, qu’est-ce qui peut nous soutenir ?
La foi qui naît quand le cœur accepte d’être crucifié, blessé mais ouvert.
Cette Pleine Lune nous invite à réenchanter notre pèlerinage.
À embrasser la traversée.
Et à se souvenir que les plus grands voyages commencent parfois là où l’on ose, pour la première fois, laisser couler les larmes tout en même temps que l’on rêve d’un autre monde… ou d’une autre vie…
Cette Pleine Lune en Sagittaire, teintée des eaux lunaires de Jupiter en Cancer, évoque pour moi quelque chose d’Ophélie — ce personnage à la fois éthéré, sacrifié, poétique et tragique. J’ai rêvé d’elle il y a quelques jours, j’en avais parlé à une amie car ça m’intriguait d’autant plus que je ne connaissais pas vraiment son histoire. Je me suis donc documentée et en analysant les aspects de la PL je me suis émerveillée des liens de sens qui peuvent se tisser autour de ce personnage énigmatique…
Comme Ophélie, cette Lune est tiraillée entre deux mondes :
Celui du rêve, du désir d’absolu, de l’élan vers l’idéal (Sagittaire),
Et celui des eaux troubles de l’émotion, de la mémoire, de la filiation (Cancer).
Ophélie, dans Hamlet, est une figure de l’innocence écorchée, une âme hypersensible, prise entre l’amour, la loyauté familiale et la folie du monde.
Elle incarne cette femme-lune : fluide, fragile, mystérieuse, engloutie par les remous d’un monde qu’elle ne maîtrise pas.
Et si cette Pleine Lune du 11 juin résonnait en partie avec cette tragédie intime? La Lune cherche l’expansion (Sagittaire) mais se heurte à la marée intérieure (Jupiter en Cancer).
Le féminin (Vénus) est blessé, en tension avec Pluton, comme Ophélie blessée dans son amour, dans sa foi en l’autre, trahie par la violence des hommes.
La pensée (Mercure en Cancer) devient émotion, se trouble, s’égare — comme si la raison ne pouvait plus faire face à la tempête affective.
Le cœur veut aimer (Mars/Vénus), mais ne sait plus comment rayonner sans être rejeté ou submergé.
Ophélie est cette figure qui a voulu croire, qui a aimé de toutes ses fibres, et qui s’est noyée, faute d’un monde où sa sensibilité ait pu s’enraciner.
Cette Pleine Lune pourrait être un moment pour réhabiliter Ophélie en nous — non pas comme victime, mais comme archétype du féminin mystique et profond. Non plus la jeune fille perdue, mais la grande rêveuse lucide, la messagère des mondes d’en dessous, celle qui connaît les chants anciens et les eaux
Et dans cette complexité, Ophélie ne nous murmure t-elle pas une autre voie ?
Non pas celle de la fuite ou du renoncement,
mais celle d’un abandon lucide, sacré :
se laisser traverser,
pleurer ce qui fut,
aimer encore,
puis se relever, lente, fragile, mais souveraine dans les eaux profondes....
Car peut-être que ce 11 juin,
Ophélie ne se noie pas : elle renaît.
Elle reprend voix dans nos silences,
danse au bord de nos lacs intérieurs,
et nous montre qu’il y a dans la tristesse une forme de résilience, d’or secret…